Les problèmes de confidentialité de Facebook pourraient nuire aux ambitions d'Instagram en matière de e-commerce

Publié le 8 avr. 2019 | 7 min de lecture

Le réseau social Instagram a fait frissonner l'industrie du Retail lorsqu'il a annoncé une fonction permettant à ses milliards d'utilisateurs d'acheter des produits directement dans son application. Mais ses ambitions commerciales pourraient être entravées par la gestion maladroite des données et de la vie privée des utilisateurs par la société mère Facebook.

Le service de partage de photos expérimente le e-commerce depuis plus d'un an. Les utilisateurs ont pu cliquer sur le bouton “acheter” pour être redirigés vers le site web d'un commerçant et terminer l'achat. Et désormais, il peuvent acheter des produits sans quitter Instagram - une innovation qui rend les choses plus faciles mais qui soulève des inquiétudes quant à la sécurité et au partage des données des individus, étant donné l'historique mouvementé de Facebook, qui a acheté Instagram en 2012 pour 1 milliard de dollars.

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"La question fondamentale est de savoir si, en tant que consommateur, vous faites suffisamment confiance à Instagram pour lui transmettre vos informations bancaires", a déclaré Jason Goldberg, directeur de la stratégie commerciale chez Publicis, une agence de marketing et de publicité située à Chicago.

Instagram a lancé sa fonction de paiement en ligne en mars, en s'associant avec 23 entreprises dont Nike, Warby Parker, Uniqlo, Zara et Kylie Jenner's Cosmetics (une star des médias sociaux). La plupart proposent donc des options pour acheter des produits directement sur l'application, et c’est Instagram qui stocke les informations de paiement et d'expédition du client.

Une porte-parole d'Instagram a déclaré que les informations de paiement stockées dans la fonction de paiement de l'application ne sont pas accessibles par Facebook, mais elle a refusé de commenter le partage d'autres données utilisateur comme l'âge, le sexe, la géographie et les habitudes d'achat. Pour les entreprises, dit-elle, Instagram "rend les choses aussi faciles que possible, en disposant d'une infrastructure partagée telle que des catalogues de produits, pour alimenter le commerce à travers la famille des applications Facebook ".

Carlina Harris, jeune femme habitant San Francisco, ne s'inquiète pas du fait que ses informations personnelles soient stockées sur Instagram. Elle a 13 000 followers, passe beaucoup de temps sur l'application, et elle adopte ce qu'elle considère comme une autre façon de faire du shopping.

"J'ai acheté un chapeau par le biais d'une publicité qui m'était destinée sur Instagram, dit-elle. "Je suis heureuse qu'il soit plus facile d'acheter sur l'application elle-même."

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Il suffirait d’un faux-pas pour soulever des inquiétudes en matière de protection de la vie privée. Pour Facebook, une expérience de 2007, consistant à lier le shopping à un logiciel connu sous le nom de Beacon a provoqué un tollé en révélant par inadvertance des achats, comme par exemple l'acquisition par un utilisateur d'une bague pour sa femme avant Noël. Facebook a supprimé la fonctionnalité en 2009 et a réglé 9,5 millions de dollars de poursuites judiciaires.

Plus récemment, l'examen des pratiques de Facebook en matière de données s'est intensifié après la révélation selon laquelle les données de quelques 87 millions d'utilisateurs du réseau social le plus populaire au monde se sont retrouvées entre les mains de la firme d'analyse de données Cambridge Analytica, qui a par la suite travaillé pour la campagne du candidat républicain à la présidentielle américaine de 2016, Donald Trump. Les erreurs n'ont fait que s'accumuler. Ce mois-ci, Facebook a été confronté à des questions concernant le stockage de millions de mots de passe d'utilisateurs en texte clair pendant des années.

Les co-fondateurs d'Instagram, Kevin Systrom et Mike Krieger, ont quitté l'entreprise l'automne dernier en raison des tensions croissantes avec le PDG de Facebook, Mark Zuckerberg, au sujet de la direction de l'application photo. Ils craignaient de perdre son indépendance et de subir un contrôle excessif de Facebook et de Zuckerberg.

Les commerçants, méfiants à l'égard de leurs expériences avec Amazon et Google, peuvent avoir d'autres préoccupations que la protection des données. “Si le comportement des consommateurs change et qu’ils se sentent plus à l'aise en achetant sur Instagram, les entreprises devront faire face à la perte de contrôle dans leurs interactions avec leurs clients”, a déclaré Alexa Tonner, co-fondatrice de Collectively, une agence de marketing à San Francisco, comprenant des clients comme Old Navy et Uber.

"Si Instagram devient essentiellement une vitrine numérique, la taille de sa portée pourrait faire peur. Je pense qu'en général, il y a de l’enthousiasme teinté d'un peu d'inquiétude", a t-elle ajouté.

D'autres obstacles existent. Les utilisateurs ne peuvent désormais acheter qu'un seul article à la fois, ce qui peut irriter ceux qui peuvent vouloir plus d'un produit par transaction et peut rendre les frais d'expédition relativement élevés pour les entreprises. L'application n'a pas non plus de commentaires ou d’évaluations, des outils que les consommateurs utilisent généralement lorsqu'ils font leur achats en ligne.

Cependant, de tels problèmes peuvent être facilement résolus, et la portée d'Instagram est énorme et s'accroît rapidement. Sur le milliard d'utilisateurs qu'il compte, environ 130 millions d'entre eux tapent déjà pour trouver chaque mois des “product tags” dans les publications shopping. C'est une augmentation de 40 millions depuis septembre, au moment où une nouvelle fonctionnalité shopping est arrivée dans l'onglet Explore de l'application, qui classe les photos et les vidéos selon différents sujets.

Le plus grand test pour Instagram est peut-être de savoir s'il peut persuader les utilisateurs d'acheter, et non pas seulement de fantasmer sur les produits. "Il est logique qu'Instagram ait suivi cette voie", a commenté Jason Goldberg. "Reste à savoir s'il devient une force influence du commerce électronique."

Le concurrent le plus proche d'Instagram qui a expérimenté le e-commerce à l'aide de photos est Pinterest. L'entreprise, qui devrait entrer en bourse cette année, disposait d'une fonction appelée " Pins achetables ", qui permettait aux clients d'acheter des produits sans quitter le site. Pinterest a supprimé cette fonction en octobre en faveur des Pins qui dirigent les utilisateurs vers les sites web des commerçants, ce qui va à l'encontre de ce qu'Instagram tente de faire.

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Pinterest pourrait concurrencer Instagram pour attirer l'attention des commerçants, surtout si les vendeurs décident qu'ils préfèrent une approche qui leur donne plus de contrôle sur le processus de paiement. L'entreprise a récemment embauché un cadre de Walmart.com, Jeremy King, qui travaillait auparavant chez eBay. Mais, il n'est pas certain que son embauche témoigne d'ambitions plus profondes dans le e-commerce. Il s’agit peut-être tout simplement du désir de renforcer la direction de l'entreprise avant son introduction en bourse.

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Source : houstonchronicle.com

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Bérangère D'Henry

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